Internet (et Youtube en particulier) fourmille de tutos sur la taille des arbres fruitiers, je ne vais pas en rajouter un mais plutôt faire un mémo de tout ce qui m’a semblé pertinent, en mentionnant les notions, liens et vidéos utiles pour ceux qui voudraient approfondir.
Principes généraux
La plupart des informations qu’on trouve concernent un type de taille typiquement français et issu d’une vision très académique : la taille dite “trigemme” (cf. ci-après). Mais d’autres visions existent, il faut garder l’esprit ouvert et bien observer son pommier, surtout dans le cas d’un vieil arbre qui n’a pas été entretenu selon les règles de l’art.
J’insiste sur ce point : il est fondamental de bien observer chaque détail de l’arbre afin de prendre les bonnes décisions, et en plus c’est relaxant… 😀
La taille d’un arbre fruitier est destinée à favoriser la fructification, il faudra aussi faire des choix stratégiques et sacrifier certaines branches pour en favoriser d’autres.
On dit souvent qu’un oiseau doit pouvoir voler à l’intérieur de l’arbre sans s’accrocher les ailes, ça donne l’idée de l’aération nécessaire : plus l’air circule, moins les parasites seront en paix, moins la mousse ou le lichen se développeront (encore que ce dernier est paraît-il signe de bonne qualité de l’air et sans aucun danger pour l’arbre, qui ne lui sert que de support).
Et ce n’est pas juste une image poétique, car si les oiseaux peuvent se déplacer librement entre les branches, on peut parier qu’ils pourront aussi manger les bestioles qui tentent de s’y installer… 🙂
• On commencera par éliminer tout le bois mort : branches, tiges et “chicots” (restes de vieilles branches ou autres moignons — à ne pas confondre avec les “chancres” dus à un champignon ou une bactérie, qu’on repèrera facilement car, s’ils sont présents, il y a de grandes chances qu’ils aient colonisé tout l’arbre, hélas).
• Ensuite on supprimera les branches qui se croisent, en touchent d’autres ou poussent vers l’intérieur de l’arbre (ce dernier point est relatif : j’ai un pommier qui a poussé de manière totalement éclatée — 3m d’envergure pour 2m de haut ! —, du coup je laisse qqs branches aller vers l’intérieur pour le rééquilibrer un peu).
Lexique
Il y a tout un jargon auquel on ne peut échapper, je citerai juste les éléments essentiels pour clarifier la suite :
- Branches charpentières : branches principales
- Coursonnes : branches partant des charpentières
- Rejets : branches qui partent de la souche
- Gourmands : tiges qui poussent à la verticale
- Yeux ou dards = prémisses des bourgeons à venir, qui peuvent être “à bois” (petit et triangulaire) ou “à fruits” (en forme de flamme), selon qu’ils donneront une tige stérile ou fructifère
- Brindilles couronnées : tiges terminées par un œil à fruits
- Bourses : gros bourgeons fructifères, traces d’une précédente fructification et qui en porteront une nouvelle à coup sûr
- Taille dite “trigemme” : signifie qu’on coupe la tige après le 3ème œil.
https://plandejardin-jardinbiologique.com/taille-trigemme.html
Grosso modo, il faut favoriser ce qui est en vert (bourgeons à fruits, brindilles couronnées et bourses) et supprimer ce qui est en rouge (gourmands et rejets).
Pour bien identifier les différents boutons, voir ces deux liens :
https://www.rustica.fr/fruits-et-verger/organes-arbres-fruitiers,2074.html
https://www.gerbeaud.com/jardin/fiches/rameaux-bourgeons-fruitiers,1137.html
Taille au vert & taille d’hiver
Deux types de tailles, selon la saison, la 1ère servant en fait à préparer l’autre.
En réalité, on peut repasser régulièrement de mai à septembre pour fignoler la taille au vert, car l’arbre n’a de cesse de pousser du printemps à l’automne.
Dans les deux cas on commencera par éliminer le bois mort et les branches qui se croisent ou poussent vers l’intérieur, comme mentionné ci-dessus.
La taille d’hiver est plus pratique car on n’est pas encombré par les feuilles, on y voit plus clair dans la structure de l’arbre, mais la taille au vert permet à l’arbre de cicatriser plus facilement, et donc de se passer de badigeonner les coupes avec un produit cicatrisant.
• Taille d’hiver (entre janvier et mars)
https://www.newsjardintv.com/comment-tailler-un-vieux-pommier/
N.B. : cette page parle de vieux pommiers, mais on y trouve 3 vidéos fondamentales pour la taille en général.
- couper toutes les tiges à 3 yeux
- garder les dards et les boutons à fruits
[- entamer l’extrémité des bourses pour les stimuler] cf. ci-dessous
- garder les brindilles couronnées
- on élimine généralement les tiges qui poussent vers le bas, sous les coursonnes
05/2021 : fort de cette première année, j’ai encore appris quelques ficelles et pu vérifier la validité de certains conseils. Tout d’abord, “entamer l’extrémité des bourses pour les stimuler” mouais, boarf… Certaines ont vu des feuilles pousser à leur base après cette opération, mais d’autres ont juste séché et aucune n’a vu de fleurs apparaître.
Après la taille d’hiver, quand les feuilles commencent à pousser, il faut guetter régulièrement celles qui se recroquevillent et dont le dessous est couvert d’un duvet blanc (c’est le fameux oïdium) ; suivant les conseils des anciens, je coupe les feuilles contaminées, sans traitement* pour l’instant, à suivre.
*N.B. : dans les régions pluvieuses, il est quasiment impossible de traiter pendant cette période printanière arrosée…
https://monjardinmamaison.maison-travaux.fr/mon-jardin-ma-maison/plantes-par-type/arbres-et-arbustes/arbres-arbustes/maladies-pommier-reconnaitre-traiter-293026.html
• Taille au vert (de mai à septembre)
https://www.rustica.fr/fruits-et-verger/tailler-vert-arbres-fruitiers,2875.html
https://www.rustica.fr/fruits-et-verger/taille-vert-pommier,4341.html
https://www.rustica.fr/fruits-et-verger/pincements-taille-vert,4340.html
- couper les brindilles comportant 12–15 feuilles après la 7–8ème : les boutons à la racine des feuilles se transformeront en boutons à fruits. Si on les coupe trop court, les dards prendront toute la sève et feront du bois, alors que là, on prépare la coupe à 3 yeux de l’hiver !
- couper à 2–4 feuilles après un fruit : on appelle ça un “tire-sève” car ces feuilles pompent la sève — dont le fruit profitera au passage. Idem pour les tiges partant du centre d’un bouquet de fruit
- couper à 1 cm du dernier œil pour ne pas l’assécher.
- on ne coupe pas les rameaux de prolongement (gourmands de la cime) : à faire en hiver — si nécessaire ! C’est là qu’intervient une vision alternative de la taille traditionnelle… On peut tirer avec des cordes ou accrocher des poids pour courber ces branches, ça arrête théoriquement leur croissance (on appelle ça “l’extinction”) tout en développant des boutons à fruits au centre de la branche — je n’ai pas essayé, ayant découvert cette technique après avoir ratiboisé tous les gourmands… 😉
05/2021 : par contre, après la taille d’hiver, j’ai attaché certaines branches fleuries avec des bouts de ficelles pour éviter qu’elles se touchent ; ainsi, j’ai évité de les couper et elles donnent des fruits !
• Éclaircissage
https://www.rustica.fr/fruits-et-verger/eclaircir-fruits-pommier-ou-poirier,4487.html
https://youtu.be/56ceXmReCYg
C’est une annexe de la taille au vert qui consiste à virer les pommes véreuses, celles qui se touchent, les plus petites et les plus moches (si elles forment un bouquet, virer de préférence celles qui vont vers l’extérieur).
05/2023 : Après quelques années d’expériences, il est clair qu’on peut commencer à nettoyer le pommier dès le mois de mai, ça permet de repérer et d’éliminer les nids de chenilles avant qu’elles ne prolifèrent. On en profite pour enlever les fleurs qui ont séché (elles tombent à peine les touche-t-on) et autres détritus que les parasites utilisent volontiers pour faire leur nid.
• Vieux arbres
https://www.aujardin.info/videos/faire-taille-restauration.php
https://youtu.be/8f0Liti8Mhg
Dans le cas du rajeunissement d’un vieux pommier négligé, il faut procéder sur plusieurs années pour ne pas trop le stresser, il risquerait d’en mourir !
- supprimer les coursonnes verticales
- supprimer les coursonnes en surnombre : elles doivent idéalement être espacées de 10 à 15cm.
05/2021 : le vieux pommier qui illustre cet article ne donnait plus de fruits depuis des années et en est couvert cette année ! Est-ce de la vanité de penser que mon intervention en est la cause ou est-ce juste une “année à fruits” ? 😉
Les outils
https://youtu.be/fppTXxcdBBs
https://www.gammvert.fr/conseils/conseils-de-jardinage/4‑outils-indispensables-pour-tailler-les-fruitiers
J’ai hésité à mettre ce chapitre en premier tant il est fondamental ! N’oublions pas que nous infligeons des blessures aux arbres, il faut donc le faire avec de bons outils et le plus proprement possible.
- toujours couper avec un sécateur bien aiguisé, avec la lame (la partie la plus grosse) du côté de ce qu’on garde — mieux vaut choisir un sécateur de qualité, dont on puisse resserrer les lames.
- toujours nettoyer les outils à l’alcool (à bruler ou autre) avant chaque plante pour ne pas propager champis ou bactéries — s’il vous reste un stock de gel hydroalcoolique après le Covid19, ça marche aussi. 😉
- couper en biais pour que la pluie ne fasse pas pourrir l’extrémité, avec le haut du biais du côté du bourgeon ou de la feuille restants — laisser 1 cm en gros, pour ne pas assécher ces éléments.
- plutôt que le mastic cicatrisant mentionné dans le lien ci-dessus, je mettrais comme 4ème outil une serpette ou équivalent bien aiguisé pour fignoler les coupes de grosses branches, dixit un jardinier aguerri : “c’est beaucoup plus utile que de foutre du mastic !” 😀
Attention, on a vite fait de se couper, une bonne paire de gants costauds n’est pas du luxe pour éviter ça !
D’estoc et de taille…
Voilà, je ne doute pas que ce mémo éclairera le débutant, il y a peut-être de légères inexactitudes ou omissions, mais mon but n’était pas d’obtenir le prix Nobel d’arboriculture… 😀
En guise de conclusion, une vidéo qui résume un peu tout ça, sauf qu’il s’agit de pommiers en espaliers, les principes restant les mêmes : https://youtu.be/VUnmCYtng0I